Témoignages des insurgés
Débris de souvenirs 2ème partie. Captivité allemande - stalags des prisonniers de guerre et camp de travail forcé. Souvenirs d’un insurgé de 15 ans.
Tirailleur-chef Witold Konecki pseudonyme "Sulima",,
Bataillon "Chrobry I"
Groupement "Sosna”
Le 3 octobre 1944 - date de capitulation de l’Insurrection de Varsovie. Le 4 octobre au matin, nos troupes appartenant au 15e régiment d’infanterie se sont déplacées vers la place Kercelego, où nous avons déposé nos armes et sommes passés aux mains des Allemands.
Formant des rangs serrés, escortés par la Wehrmacht, nous marchions à travers les rues dépeuplées et complètement ravagées du quartier Wola, nous dirigeant vers l’Usine des Câbles d’ Ożarów, où était localisé le point de répartition des prisonniers de guerre. Dans les alentours de Ożarów, les habitants des parages se sont précipités sur la chaussée pour y éparpiller des oignons et des fruits destinés aux prisonniers. Les Allemands les chassaient avec brutalité.
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Défilant le long d’une plantation de choux, j’ai pu me rendre compte qu’il y avait une opportunité d’évasion, parce que l’Allemand qui nous escortait était en train de chasser une femme portant une corbeille remplie de pommes. L’espace d’un éclair, j’ai franchi un fossé et, couché au ventre, je longeais en rampant les billons plantés de choux, tout en m’éloignant du convoi. J’ai ressenti un souffle de la liberté. Ayant traversé une distance d’environ 150 mètres, j’ai relevé la tête et j’ai aperçu au loin de nombreux postes de mitrailleuses et des Allemands rôdant dans les alentours. J’ai été obligé de faire marche arrière et ramper en direction de la chaussée. Après avoir atteint la chaussée, j’ai rejoint en un saut la colonne des prisonniers en marche.
Le 4 octobre 1944 dans l’après midi, un nouveau détachement de l’Armée de l’Intérieur issu de l’Insurrection de Varsovie a franchi l’entrée de l’Usine des Câbles d’Ożarów; c’est au sein de ce détachement que je me suis retrouvé après une tentation d’évasion à travers le champ de choux à Jawczyce. Je me retrouve seul parmi des soldats inconnus tassés dans un grand atelier de fabrication. Malgré la fatigue, je ne pensais pas au repos, mais j’ai entrepris la recherche des collègues de mon groupement. A la tombée de la nuit, quelqu’un m’a saisi soudainement par la main et s’ést écrié: "Sulima"-c’est bien toi? Et ton évasion? Au bout de quelques instants, la situation s’est clarifiée. "Bogdaniec"-parce que c’était lui- m’avait rencontré par hasard et m’a conduit à mon groupe rassemblé dans le même atelier, mais dans son angle opposé. L’ambiance est devenue vive et joyeuse.
Sur un sol en béton, on avait disposé une certaine quantité de paille en guise de paillasse pour dormir. La nuit aurait été excellente sans le colorant rouge qu’on avait éparpillé au sol, en dessous de la surface de la paille. Le lendemain matin, nous étions salis par ce colorant qui, trempé par la sueur et l’eau, virait au rouge très vif. Nous portions donc des marques indélébiles, ce qui empêchait toute tentative d’évasion. Le lendemain, une rame de wagons à marchandises a pénetré dans l’usine, après quoi les Allemands ont commencé à installer dans chaque wagon des groupes de 60 prisonniers, conformément aux lettres de voiture dûment remplies. Après la guerre, j’ai reçu de la part du Musée de Łambinowice une copie de telle lettre portant le numéro 351, dans laquelle se retrouvent mes données personnelles.
Sur le chemin de la captivité allemande
octobre 1944
Ainsi donc, nous avons commencé un voyage dans l’inconnu. Ma place était à l’angle même du wagon ; je me tenais debout serré des deux côtés par les parois du wagon. C’était avec beaucoup de peine que j’arrivais à me tourner vers la paroi ou vers l’intérieur du wagon. J’étouffais, il n’y avait aucune circulation d’air, des jurons se mélangeaient à la prière. J’ai été pris par la peur- sensation inconnue depuis longtemps. De nouveau, il faut que je lutte pour la survie. A un moment donné, je me suis rendu compte que j’avais réussi à trafiquer un canif. J’ai décidé immédiatement de creuser un trou dans la planche du wagon. Cette tâche m’a pris quelques heures, mais le résultat était excellent : de nouveau, je pouvais respirer l’air frais.
Extrait d’une lettre de voiture du Stalag XIB Fallingbostel archivée par CMJW
Le voyage a duré plus de 30 heures. Pendant le trajet, notamment pendant les arrêts, les Allemands tiraient des coups de mitrailletes le long des wagons, ce qui devait prévenir toute tentative d’évasion et étouffer les cris des gens tassés dans les wagons. Les Allemands ont jeté dans mon wagon, à travers une petite fenêtre, quelques dizaines de betteraves à sucre qui ont été ensuite interceptées et consommées par nos colleguès plus énergiques, ce qui n’a pas manqué de provoquer des effets désastreux. Les betteraves consommées ont provoqué les brûlures et les maux d’estomac, accompagnés de diarrhée et de vomissements. La soif était terrible et les gémissements des malades horribles. Heureusement, je n’avais pas réussi à attraper ces betteraves.
Derrière Częstochowa, l’un des wagons a été pris sous le feu des Allemands. Un sous-officier de la 3e compagnie du 15e régiment de l’AK a été tué à cette occasion, alors qu’un aspirant de 24 ans, Witold Antoniewski pseudonyme „Ranicki” et un adolescent surnommé Słoń”, ont été blessés. Les Allemands n’ont pas évacué le corps du wagon et n’ont pas non plus aidé les blessés. Le transport susmentionné était acheminé vers le Stalag 344 O/S Lamsdorf.
Après un voyage de deux jours, nous sommes arrivés au point de destination. Pendant le déchargement des wagons, les soldats allemands se comportaient de façon brutale envers les Insurgés: ils les poussaient sur le talus, les frappaient à coups de crosses, les blessaient à coups de baïonnettes, les rouaient de coups de pied, arrachaient les aigles des casquettes, lançaient des injures, enlevaient aux blessés leurs cannes. Avec l’accompagnement des menaces et injures, les Allemands formaient les colonnes de marche escortées par les soldats armés possédant des chiens.
Le transfert à pied entre la gare de chemin de fer et les camps pour les prisonniers de guerre situés à 5-6 kilomètres s’effectuait à un rythme rapide, au milieu de la population allemande qui formait une haie en lançant des cris menaçants. Les femmes et les jeunes members de "Hitlerjugend" s’approchaient des prisonniers et les battaient à l’aide de tout ce qu’ils avaient à leur portée, en crachant et en injuriant. L’escorte arrachait des mains des prisonniers leurs valises et ballots présentant un intérêt quelconque et les jetait par-dessus les clôtures dans les cours de ferme longeant la route. On excitait des chiens sur ceux qui traînaient à l’arrière de la colonne. Certains prisonniers jetaient eux-mêmes par terre leurs sacs à dos, valises, couvertures et pardessus, afin de tenir le rythme de la marche et ménager leurs forces afin de sécourir les enfants, épuisés et blessés. J’ai abandonné sur cette route mon sac à dos et la couverture. J’étais au bord de l’évanouissement. J’ai été sauvé par un verre d’eau que j’avais acheté au prix de 20 dollars à une femme qui se tenait sur le bas-côté de la route. Ces 20 dollars représentaient toute ma solde remise par le commandement. J’ai cedé quelques gorgées à mon ami.
Pendant cette „marche de l’horreur” s’est produit quelque chose de singulier et d’insolite. A l’arrivée dans le camp, nous avons assisté à une catastrophe aérienne: collision entre deux avions militaires allemands qui se sont écrasés en vol dans notre champ de vision. Pour nous, c’était un signe avant-coureur de la chute du IIIème Reich.
Après tant d’années, il m’est difficile d’évaluer avec précision la distance que nous avons parcourue. Il me semblait alors que cette route était sans fin. Je crois quand même que nous avons traversé une distance de 6 kilomètres environ. Ayant quitté la forêt du côté du champ, nous avons franchi une grande porte et pénétré dans la superficie du camp, bâtie par des baraques serrées construites en bois, avec une grande place d’appel au milieu. Le camp portait l’identification suivante: M. Stammlager 344 Teillager Lamsdorf O/S.
Stalag. Photographie archivale
Nous avons passé toute la nuit sur la place d’appel. Au petit matin, les prisonniers soviétiques nous ont conseillé de détruire tous les documents, notamment nos pieces attestant des distinctions militaries reçues. J’ai décidé donc de dissimuler le fait que j’avais reçu une Croix de la Vaillance et une Croix du Mérite de bronze avec Eppées à titre de ma participation aux combats dans les rues et sur les barricades de Varsovie. Mes collègues font pareil. Nos documents flambent sur la place d’appel. Les prisonniers soviétiques sont nos voisins, cependant nous sommes séparés par des fils barbelés et des “bandes de la mort”, éclairées par les feux des phares. Les Russes nous supplient de leur fournir des vêtements chauds, à notre tour, nous les prions de nous donner du pain. Le troc par-dessus les barbelés commence. En échange du pain, nous vendons nos vêtements et montres. Enfin, les Allemands interviennent pour mettre fin à ces transactions. Les prisonniers doivent se tenir à l’écart des barbelés. Le matin, la durée de l’appel est de plus de 5 heures. Les Allemands nous comptent et recomptent, écument de rage et hurlent, quant à nous, nous sommes extrêmement fatigués et apeurés.
Enfin, on nous autorise à aller dans les bains où, déshabillés complètement, sommes soumis au rasage des toutes les parties velues du corps à l’aide des rasoirs mal affilés. Les parties rasées ont été graissées d’un désinfectant visqueux et puant, ce qui a provoqué des piqures terribles de la peau. Après le bain- immatriculation et attribution d’uniformes et de manteaux soviétiques estampillés au dos à l’aide des lettres rouges Kgr. On nous attribue aussi un vieux linge militaire, des bottes tchèques détériorées et des plaques d’immatriculation de prisonnier métalliques. Nous n’avons jamais révu nos vêtements et affaires déposées dans les bains : elles étaient perdues pour toujours. Après toutes ces démarches, on nous a accroché au cou des panneaux portant notre numéro de matricule agrandi. A partir de ce moment, pour les Allemands, nous n’étions plus des individus, mais des numéros dans le fichier général du camp. Mon numéro c’était 103162.
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Famine, intempéries d’automne, conditions d’hygiène catastrophiques formaient un milieu favorable pour les insectes qui sont vite devenus un fléau au camp. Nous habitions des baraques en bois sans portes ni vitres dans les fenêtres. Dans chaque baraque, il y avait seulement un poêle de fonte, appelé "bique", sans aucune provision de combustible. Les lits de planches pour deux et trois personnes étaient sans paillasses ni plaids. De telles conditions favorisaient les maladies telles que diarrhée dysentérique, anémie, pneumonie et scorbut. Quand il faisait froid, il nous arrivait souvent de nous proteger en allumant un feu à l’aide des planches arrachées aux lits. Le régime alimentaire était très modeste et toujours identique. Le matin : une miche de pain pour sept prisonniers, 20 grammes de margarine ou de marmelade, un demi-litre de café. A midi : un demi-litre de soupe de rutabaga séché, 2 à 3 patates en robes des champs, 2 cuillères de sauce à base de viande. Le soir : un litre de café.
Très pénibles et fatiguants étaient des appels quotidiens organisés par les gardiens allemands qui se déroulaient à ciel ouvert et duraient plusieurs heures. Ces appels étaient organisés sans tenir compte des conditions atmosphériques dans le but de contrôler les effectifs des prisonniers. Modestement vêtus, nous étions obligés de rester immobiles au garde-à-vous dans la boue allant jusqu’aux chevilles, souvent exposés au gel et au vent.
Le 18 octobre 1944, un long appel inattendu a été organisé durant lequel les Allemands ont séléctionné 550 les plus jeunes soldats ayant l’âge entre 12 et 17 ans, jusqu’alors dispersés dans différents secteurs et baraques du camp, mélangés aux adultes. Cet appel a été filmé par les Allemands dans le but de mettre à profit le thème des enfants-soldats et de propager ainsi l’idée de Volkssturm parmi les jeunes Allemands, appelés à compléter les effectifs de l’armée régulière et constituer un élément important dans le système de défense du Troisième Reich, en réponse aux appels désespérés d’Adolphe Hitler. Les garçons boycottaient habilement le tournage de la chronique en se comportant irrespectueusement envers l’équipe de tournage allemande. Les fonctionnaires allemands ont été pris d’un accès de rage et d’indignation. Ils ont arrêté le tournage du film qui-contrairement à leurs projets- est devenu l’expression de l’héroïsme et de la vaillance des plus jeunes prisonniers – Insurgés de Varsovie.
Insurgés de Varsovie – prisonniers de guerre
Au cours de cet appel, sans en être conscients, les Allemands ont séléctionné un groupe unique et homogène parmi tous les prisonniers de guerre, incomparable à aucun autre – groupe des plus jeunes défenseurs de Varsovie. C’était justement envers nous que les Allemands avaient pris des dispositions les plus cruelles, en nous condamnant aux conditions de vie au camp des plus restrictives suivies du travail forcé dans les usines d’armement allemandes. Les Insurgés les plus jeunes ont été traités de la manière la plus inhumaine et criminelle, au moyen d’un plan ignominieux d’extermination physique et de destruction psychique des adolescents ayant l’âge entre 12- 17 ans.
Le commandement allemand du stalag 344 OlS Lamsdorf avait ignoblement trompé nos tuteurs, officiers de fonction polonais, en leur promettant d’emmener les plus jeunes prisonniers à Częstochowa, pour les confier à la tutelle de RGO (organisation charitative mise en place par les Allemands sur les territoires occupés de la Pologne). A la suite de cet appel de sélection, nous avons été privés de la protection de nos collègues adultes et installés dans un secteur spécial du camp au régime disciplinaire strict, réservé à la 5ème catégorie des prisonniers envers laquelle les Allemands avaient la liberté d’appliquer diverses mesures cruelles dans l’atmosphère de l’impunité.
Dans ces circonstances, l’évasion était pour nous un acte de désespoir. Je faisais partie d’un groupe des quatre garçons qui ont tenté une échappée. Nous avions pu observer que la garde du camp n’était pas uniquement composée de soldats armés postés sur les miradors appelés "nids de cigogne", mais aussi de patrouilles externes, circulant autour du camp sur des bicyclettes, aidées des chiens spécialement dressés. L’évasion a été planifiée pour le jour où il y aurait un brouillard épais, dans le secteur médian entre deux « nids de cigogne », immédiatement après le passage de la patrouille.
Insurgés de Varsovie – prisonniers de guerre
Le sort avait voulu que je ne pouvais pas participer à l’échappée, à cause des circonstances imprévues survenues entre-temps. En effet, un jour le bruit s’est répandu que les Allemands avaient jeté dans les latrines des patates gelées. Cette information était exacte. Les patates étaient situées au fond de la latrine. Sans tarder, dans un grand secret, nous avons organisé une action d’extraction. Les patates, après leur lavage soigné à l’eau et broyage à l’aide d’une boîte de conserves, ont été réduites à une pâte que nous faisions cuire sur des briques disposées au dessus d’un feu, ce qui la transformait en une espèce de galettes. Nous pouvions enfin assouvir notre faim. Chaque garçon de notre groupe a reçu autant de galettes chaudes qu’il en désirait. Les galettes restantes ont été distribuées équitablement à tout le monde et pouvaient constituer une réserve pour les jours à venir. Dans la mesure où les galettes chaudes étaient bien tolérées par nos estomaces affamés, les galettes froides, quelques jours après, ont provoqué des troubles gastriques graves. Pour ce qui me concerne, les galettes ont été à l’origine d’une dysenterie sanglante très aïgue et dangereuse pour la vie. Au fil des heures, mon état devenait de plus en plus grave : hémorragies, fièvre forte, affaiblissement et syncopes momentanées mais fréquentes. J’étais convaincu de la fin imminente de ma vie, loin de ma famille, sur un sol lointain et hostile, privé de toute aide médicale. Mes collègues me traînaient de force jusqu’à la place d’appel – je n’avais plus la force de me tenir debout. Je ne pouvais pas déclarer ma maladie auprès des autorités allemandes, parce que je redoutais le lazaret dans lequel de tels symptômes étaient qualifiés comme typhus, ce qui provoquait un isolement à la suite duquel le sort du patient était complètement inconnu. Je donnais mes rations alimentaires aux collègues, parce que mon organisme n’acceptait aucun repas.
J’étais couché sur les planches du lit, en haillons, baigné dans mon propre sang, ravagé par une fièvre énorme, n’ayant même plus la force d’aller à l’appel sous les bras de mes collègues quand un événement d’une grande importance s’est produit : j’ai reçu une lettre de la part de ma Mère. Sur un petit bout de papier, elle m’avait écrit ces quelques mots que je n’oublierai pas jusqu’à la fin de ma vie: -"Mon le plus Cher Fils, où que tu sois, dans l’exténuation ou dans la maladie, dans le danger ou dans la souffrance, je sais que tu luttes pour ta survie. Tu vas gagner cette lutte – c’est ta Mère qui te le dit, Mère qui ne ment jamais. Nous nous reverrons bientôt et serons heureux – je t’embrasse- ta Mère".
Ma mère - Cecylia Wanda Konecka née Garbowski
C’était un moment décisif de ma maladie. Je n’arrivais pas à croire mes sens, je survivrai donc, parce que c’est ma Mère qui me le dit. Tout de suite, mon organisme a reçu une injection vivifiante de confiance. Physiquement, c’était un prisonnier soviétique qui m’a sauvé de la mort. Sur la prière de mon ami "Zych", il a acheté au prix d’une montre une petite poignée d’un herbe sec, a conseillé de le broyer à l’aide des galets, noyer dans l’eau bouillante et boire 4 fois par jour. Ce mode de traitement s’est montré efficace. Déjà le lendemain, les hémorragies ont été jugulées, les douleurs sont devenues moins aïgues, j’étais cependant si affaibli et maigre que c’était avec beaucoup de peine que je me tenais sur mes jambes. Peu à peu, l’appetit me revenait.
Je vais revenir maintenant au récit de l’échappée. Mes amis ont décidé de l’entreprendre sans moi. Finalement, la liste de ceux qui ont tenté l’évasion est la suivante: Jan Zbigniew Sznytko "Bogdaniec" nº de matricule 103235, Janusz Jan Wiśniewski "Irek" nº de matricule 103161 et Jan Lewandowski "Aleksander". Cette courageuse entreprise a eu des conséquences tragiques. Pendant la nuit du 1er novembre 1944, profitant d’une coupure dans le balayage des phares situés sur le « nid de cygogne », les garçons se sont faufilé un à un à travers la clôture, ont coupé les fils et ont mis de côté les rouleuax de barbelés afin de se frayer un chemin au polygone. Tout à coup, un officier d’inspection allemand monté sur une bicyclette a fait son appartition. Le chien qui courait à ses côtés a flairé les fugitifs, a sauté sur les barbelés et s’est mis à aboyer. L’Allemand s’est arrêté, a éclairé les barbelés avec sa lampe de poche et a tué "Bogdaniec" à coups de pistolet, et a blessé gravement "Irek" i "Aleksander" alors en fuite (déjà sur le polygone). Le corps de Zbigniew Sznytka et les blessés Lewandowski et Wiśniewski ont été battus à coups de crosses, roulés de coups de pied et mordus par les chiens, ce qui a causé chez ces deux derniers des blessures pénibles. Les garçons avaient tenté de s’évader de plein droit en tant que prisonniers de guerre, en plus, au moment de leur découverte par les chiens allemands , ils n’avaient opposé aucune résistance et demandé qu’on leur fasse grâce de la vie.
Irek, gravement blessé et inconscient, a été reconnu mort. On lui a enlevé sa plaquette de matriculation, en portant une mention appropriée au fichier du camp. La vie de "Irek" a été sauvée grâce à toute une chaîne des gens de bonne volonté, y compris des prisonniers de guerre soviétiques et des infirmiers polonais. Cependant, conformément au fichier officiel, il est décédé cette mémorable nuit de novembre. Jan Lewandowski "Aleksander" a été gravement blessé au menton. Trois mois après, je l’ai vu au camp se déplaçant à pied sous l’escorte. Il était horriblement jaune et maigre.
La famine devenait de plus en plus difficile à supporter, alors que les rations journalières ne dépassaient pas 700 calories. La diarrhée sanglante et les refroidissements touchaient un nombre croissant des prisonniers adolescents. Les malades n’avaient plus la force de se présenter à l’appel. Les Allemands ont été obligés de les décompter quand ils étaient couchés sur leurs grabats.
Mes amis m’ont entouré de soins attentifs. Peu à peu, je recouvrais mes forces et ma santé. Je préférais échanger mes patates du déjeuner contre une demie-tranche de pain. Le pain était pour nous la plus grande rareté. Le partage du pain était effectué systématiquement en présence d’une commission prévue à cet effet, conformément au tirage au sort. Une carte décidait qui obtiendrait quel morceau de pain.
Insurgés de Varsovie – prisonniers de guerre
L’hiver approchait. Le 18 novembre 1944, je me suis retrouvé au sein d’un groupe de 242 prisonniers ayant quitté le stalag de Lamsdorf pour rejoindre le camp de transit IV B Muhlberg – Elbe, conformément à la liste de transport allemande nº 351.
Le voyage a duré plus de 4 jours. Nous étions enfermés et tassés par 60 dans des wagons à marchandises, sans la possibilité d’ouvrir les portes et fenêtres, privés d’eau et possédant seulement une modeste ration de vivres secs. À notre arrivée à Mühlberg, nous étions affamés, extenués, extrêmement fatigués, malades et effondrés psychiquement. Nous n’étions alors qu’un amas d’êtres humains vivants, vulnérables et veules, privés de nos tuteurs. Notre unique préoccupation était de survivre. À Mühlberg, nous avons passé environ 10 jours et avons reçu les nouveaux numéros de prisonnier. Mon nouveau numéro était 305713. Notre nouveau cantonnement se trouvait dans un grand atelier industriel sans grabats où nous couchions à même le sol.
Dans les premiers jours de décembre 1944, j’ai été incorporé à un groupe de 54 personnes obligées de travailler comme des forçats dans une usine de fabrication d’armes automatiques Wanderer Werke à Chemnitz, en tant que kommando de travail du stalag IV F Hardmansdorf. On nous a atribué de nouveaux vêtements et manteaux avec un marquage Kgr à la peinture blanche et au triangle rouge appelé Rot-Winkel.
L’usine Wanderer Werke fabriquait des armes automatiques et des bombes dans un cycle de production complet, c’est-à-dire depuis la matière première jusqu’au produit fini, ce qui imposait des mesures spéciales au niveau de la technologie, du personnel et de la protection. La production était strictement secrète, couverte par les dispositions du secret militaire. Nous étions conduits à nos postes de travail uniquement en groupes compacts, pendant la réalisation des tâches de production, nos gardiens armés surveillaient chaque sortie en dehors de l’atelier de production. Notre groupe commandait les machines pour la coupe des métaux, tourneuses, fraiseuses et sableuses. Je fabriquais des corps pour des mitraillettes, en commandant une matrice automatique. À une grande échelle, nous faisions des actes de sabotage consistant principalement à fabriquer des éléments avec certains défauts discrètement cachés.
Notre groupe était isolé des autres collaborateurs et du monde extérieur. Nous étions cantonnés dans l’enceinte de l’usine dans une salle ayant la superficie de 55 m2. Nous dormions dans des lits de bois à deux étages. Cette salle était adjacente au local des gardes armés qui y avaient une permanence de vingt-quatre heures. Notre salle avait des fenêtres avec grillage qui n’étaient jamais ouvertes (à cause du secret de la défense). La touffeur et l’absence d’air frais constituaient une incommodité encore plus grande que la famine, le travail de forçat et la grande peur provoquée par les alertes aériennes continuelles. Dans une chaleur suffocante, nous subissions des accès de folie furieuse, souffrions de dépression et d’effondrements nerveux. Pendant 5 mois nous n’avons pas quitté les murs de l’usine, n’avons pas vu le ciel. Au travail et de retour du travail, nous étions conduits en rangs serrés à travers des couloirs de liaison couverts. Nous travaillions sans interruption 10 à 12 heures par jour sans aucune journée du libre.
Notre tuteur polonais était chef de peloton Józef Wański, personnage très mystérieux, au sujet duquel nous ne savions pas grand chose, c’est pourquoi il n’inspirait chez nous ni confiance ni sympathie. Nous avons commencé notre travail après une courte formation professionnelle. Nous commandions les machines de fabrication des armes. Cependant, les Allemands n’ont pas tiré un grand profit de notre travail. Nos gars provoquaient sciemmement des pannes des machines et des produits semi-ouvrés. Tous cela se déroulait, bien évidemment, d’une manière très réflechie, afin de compliquer l’identification des coupables. Cette situation mettait les Allemands en colère, ce qui se répercutait sur nos estomacs et provoquait des sanctions disciplinaires. Les raids aériens de l’aviation alliée et les traversées fréquentes jusqu’à l’abri aérien créaient les conditions favorables aux actions de sabotage dont la portée était de plus en plus vaste. Les alertes aériennes terrifiaient les Allemands. Envahis par la panique, ils quittaient immédiatement leurs postes de travail et se rendaient au pas de course aux abris. Pendant ce temps, nos gars traversaient les ateliers vides sans se dépêcher, en vidant au passage les placards allemands des provisions alimentaires.
En avril 1944, la ville Chemnitz s’est changé en un tas de décombres. Un seul raid de quelques centaines d’avions alliés a détruit presque complètement la ville. Les bombardements massifs dont la durée minimale était de deux heures, avec l’utilisation des bombes brisantes et incendiaires, ne donnaient pas beaucoup de chance de survie aux Allemands, même à ceux qui se cachaient dans d’excellents abris sous les grands immeubles. Tout était dans les flammes, même les arbres et immeubles inflammables. Les gens brûlaient dans la rue, après avoir quitté leurs abris échauffés. On dit que cette nuit-là, quelques dizaines de milliers de gens ont péri à Chemnitz. Quant à nous, nous étions dans les abris souterrains de l’usine. L’usine n’a pas gravement souffert pour cette raison qu’elle était en grande partie détenue par le capital des pays occidentaux. Chemnitz ressemblait à la ville de Varsovie tombée en ruines. Les Allemands paniquaient.
Nous étions indemnes aux bombes, tous ont été sauvés, nous nous rejouissions de ne pas être obligés de travailler dans une usine d’armement. Après le raid, nous étions utilisés pour sauver des gens ensevelis sous les décombres. Il était plus facile de se procurer de la nourriture. Dans les caves des Allemands, il y avait des réserves modestes de vivres, principalement des conserves de légumes. Le printemps 1945 approchait. Au loin, on entendait le grondement du front qui s’approchait. L’évacuation du camp a été décidée, notre tuteur, chef de peloton Wański a disparu, nous allons à pied vers la Tchécoslovaquie.
Les gardiens qui nous surveillent ne se montrent pas suffisamment vigilants. Avec mes trois collègues, j’entreprends une échappée qui se termine par une « tuile » trois jours plus tard. En effet, épuisés par la famine, nous avions été forcés de quitter la forêt et nous rendre au village voisin pour prier un fermier de nous donner des vivres. Pendant le repas, nous avons été encerclés par les soldats SS et forcés à capituler. Nous l’avons fait après avoir découvert nos plaques de matricule et déclaré que nous étions prisonniers de guerre couverts par la convention de Genève, bénéficiant des droits de combattant.
C’était ainsi que nous sommes redevenus prisonniers après quelques jours de liberté, cette fois, nous nous retrouvions entre les mains des SS. Acheminés à un poste de police, nous avons été enfermés dans des cellules "verticales" dans lesquelles il fallait se tenir debout tout le temps. Privés de vivres, d’eau et de lumière, tout le temps debout, nous avons passé plus de deux jours dans ces circonstances. Nous étions complètement effondrés, extenués et sur le point de mourir quand un évenement exceptionnel s’est produit : la porte s’est ouverte, après quoi on nous a embarqué dans un camion. Une heure après, nous étions emmenés dans un camp dans lequel étaient enfermés les collègues de notre kommando – c’était dans les alentours de Annaberg. Dans ce camp se trouvaient également des prisonniers soviétiques et slovaques. Ce transfert s’était opéré en compagnie des hauts officiers SS et de la Wehrmacht, en présence des représentants de la Croix Rouge suedoise.
C’étaient les derniers jours de la guerre. Le 6 mai 1945, l’armée américaine nous a apporté la liberté. Avant que cela ne se soit produit, nous avions assisté à une révolte des prisonniers soviétiques lesquels, disposant des preuves que les Allemands se préparaient à dynamiter le camp, avaient supprimé les gardiens du camp à l’aide des mains nues. L’armée américaine est entrée au camp déjà contrôlé par une autogestion des prisonniers. Les jours suivants n’étaient qu’une grande fête de la victoire sur le fascisme.
Les Américains ont décidé que la ville d’Annaberg serait un point de rassemblement des anciens prisonniers de guerre.Dans cette ville, étaient formés des détachements incorporant différentes nationalités, y compris Polonais. Notre groupe constituait une unité spéciale placée sous le commandement des officiers américains. Nous avons reçu la proposition de passer quelques mois en Allemagne pour partir plus tard à Barbara en Afrique, être incorporé à l’armée du général Maczek et servir dans les compagnies de garde. J’étais obligé de me décider sur le champ, parce que nous nous trouvions dans la zone de démarcation que les Américains étaient obligés d’évacuer pour la remettre entre les mains de l’administration soviétique.
Finalement, avec mon collègue Maksymilian Nackiewicz, je me suis décidé à prendre le risque de retourner en Pologne. Nous nous déplaçions en direction de Wroclaw, seuls, à pied, à bicyclette ou à cheval. Environ 40 kilomètres derrière Annaberg, nous rencontrons un chariot à cheval, avec 5 soldats polonais montés à son bord, anciens prisonniers de guerre de 1939. Ils nous proposent de voyager ensemble en Pologne, ce que nous acceptons volontiers. Ainsi, nous sommes sept embarqués sur le chariot. Deux de nos compagnons sont munis d’armes courtes. Après avoir traversé ensemble quelques kilomètres, nous avons aperçu, au loin, un détachement de soldats portant des uniformes en mauvais état et un armement dépareillé. Nous étions convaincus que c’était une patrouille soviétique explorant ce territoire. À une quinzaine de mètres de distance, ce détachement a ouvert le feu sur nous à l’arme automatique. Un de nos soldats dans la force de l’âge a été blessé, deux autres ont répliqué à coups de tirs, quant à nous, nous avons sauté du chariot en nous mettant en fuite dans deux directions opposées. En courant en pleine vitesse à travers la cour d’une ferme désertée, je suis tombé dans une fosse à purin. Dissimulé dans ma cachette, j’ai attendu jusqu’au soir avant de poursuivre mon chemin solitairement.
Je traversais des villages et bourgades dépeuplées et brûlées. J’étais habillé en civil. Je me présentais aux Russes en tant que Polonais qui avait travaillé comme ouvrier -forçat chez un fermier allemand, maintenant étant de retour en Pologne. La route à travers Wroclaw était bloquée à cause du choléra. J’ai pris la direction de Legnica. L’accueil que cette ville m’a réservé était particulièrement inhospitalier.
En effet, la première enité administrative « polonaise » rencontrée, devant laquelle je me suis déclaré comme Insurgé de Varsovie, membre de KEDYW (diversion), décoré d’une médaille de la vaillance, s’est révelée être un poste de N.K.V.D. À la suite d’un tel accueil, on m’a passé les menottes et jeté dans une cave, tout en me menaçant de me déporter en Sibérie. Je me suis effondré, une peur incontrôlable m’a saisie. Aux cours des interrogatoires, j’étais battu à coups isolés. Je ne disais que la vérité et mes tortionnaires étaient certainement surpris d’une telle « jobardise ».
Après la guerre, les héros de l’Insurrection de Varsovie ne pouvaient pas
s’attendre à des parades ou des gerbes de roses, tout au contraire,
ce qui les attendait,c’étaient les persécutions et mensonges de la propagande communiste
Je crois que ma sincérité enfantine a fini par désarmer le lieutenant ou bien il s’était rappelé qu’il était Polonais. Quoi qu’il en soit, il a décidé de m’aider. À la suite de l’un des interrogatoires il m’a dit que je ne serais en vie que grâce à lui, après quoi il a enlevé les menottes et demandé de courir ventre à terre. C’était peut-être ma dernière chance que je ne pouvais pas rater. En un coup de vent, j’ai bondi vers la porte et, à travers la cage d’escalier, je me suis retrouvé dans la cour. Des tirs se faisaient entendre, mais je savais que je n’en étais pas la cible – le lieutenant avait tenu sa parole.
J’étais complètement effondré, la peur paralysait mes pensées, je sentais que le monde dans lequel je vivais s’était écroulé. Guidé par l’instinct, j’ai couru à travers quelques rues et trouvé une maison déserte dans le faubourg dans laquelle j’ai trouvé une cave remplie de charbon. Je me suis caché dans la cave pendant toute la journée, la nuit et le jour suivant. Je souffrais à cause de la famine, en plus, je n’avais aucun plan d’action.
Finalement, j’ai décidé de quitter la cave et je suis parti dans une direction inconnue. Une patrouille soviétique sur laquelle j’étais tombé par hasard m’a conduit à son quartier. Au poste d’accueil, le commandant m’a beaucoup questionné- mes réponses étaient fermes, mais mensongères. Je disais que j’avais travaillé chez un fermier allemand , que mes parents avaient été assassinés dans un camp de concentration et que je me dirigeais vers Poznań. Le commandant a donné l’ordre de me donner à boire et à manger et de me coucher dans un lit de planches délabré.
Peu de temps après, une amitié s’est crée entre nous. Ce haut officier soviétique, en tant que vétéran étant en contact direct avec l’armée américaine dans la zone de démarcation, avait reçu des remerciements pour son service héroïque et démobilisé. Il attendait l’accomplissement des formalités qui lui permettraient de retourner à l’URSS. C’est en compagnie de cet officier que je pris le départ de Legnica dans le premier transport soviétique partant vers l’est. J’étais convaincu que ce transport traverserait la Pologne. J’assurais mon tuteur que je ne le quitterais pas et que je serais son fils adoptif. Dans notre wagon à marchandises rempli de biens appropriés, nous avons passé quelques jours, entrecoupés par des arrêts fréquents. Une nuit, quand nous étions à l’arrêt en gare Azory près de Kutno, j’ai ôté mon uniforme soviétique pendant le sommeil de mon tuteur, j’ai laissé les armes et sauté du wagon pour me mettre en fuite ventre à terre droit devant moi, ma seule préoccupation étant d’être le plus loin du train.
Je ne pouvais plus retourner au domaine des mes parents à Miłonice à cause du décret du PKWN (gouvernement provisoire polonais instauré par Staline) publié en juillet 1944 en vertu duquel le domaine avait été repris par l’état et démembré. Je savais néanmoins que ma tante habitait pas loin de là, à Krośniewice. J’ai été donc obligé d’effectuer une marche de plus de 20 kilomètres. Le chemin du bonheur était viable. Ma tante était à la maison, nous ne pouvions pas contenir notre joie. J’étais une véritable pelote de nerfs, je pleurais et ne pouvais pas me calmer. Les médicaments servis par ma tante étaient inefficaces. Bientôt quand même je me suis endormi pour dormir pendant plus de 12 heures. Quand je me suis réveillé, mes parents étaient près de mon lit. Je me suis senti heureux et en sécurité. Le cauchemar de la guerre était terminé, je pouvais redevenir enfant. En 1945, j’étais donc de retour après le dédale de la guerre.
Pour terminer ce récit de la captivité organisée par les tortionnaires allemands pour les plus jeunes Insurgés de Varsovie, j’affirme que nous faisons partie d’une génération des enfants et adolescents auxquels la guerre a ôté leur enfance. Nous avions environ 12-14 ans au moment où nous nous sommes lancés dans les activités clandestines au sein du scoutisme illégal et dans les rangs de l’Armée de l’Intérieur.
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L’histoire de la lutte contre l’occupant suivie du calvaire des prisonniers a été écrite par nos actes enfantins et adolescents, scellée par le sang et la souffrance. Le profond patriotisme et une endurance spirituelle exceptionnelle méritent la mémoire durable des générations futures. Chacune de nos histoires individuelles était marquée par l’amour de la Pologne. La participation aux combats et le temps passé dans les camps allemands ont façonné notre attitude envers la vie et la mort, en devenant pour nous une période de maturation et de dévelopement de la personnalité dans des conditions extrêmes. Nous sommes fiers d’avoir pu prouver par nos biographies que le patriotisme et l’amour de la Patrie étaient toujours notre objectif suprême.
Witold Konecki
traduction: Wojciech Włodarczyk
Tirailleur-chef Witold Konecki "Sulima" |
Liste des 550 participants de l’appel du 18.10.1944 effectué au Stalag 344 Lamsdorf.
(selon l’ouvrage de Damian Tomczyk "Najmłodsi jeńcy w historii wojen. Powstańcy warszawscy w Stalagu 344 Lamsdorf.", Opole 1993)
Pour plus d’informations au sujet du camp Lamsdorf, consultez ce site
CENTRALNEGO MUZEUM JEŃCÓW WOJENNYCH W ŁAMBINOWICACH
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